Culture / Interview
La vie de prof mise en scène
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Interview
« Un vertigineux saut dans le vide »
Comédien confirmé, Sébastien Bravard a été professeur des écoles durant six ans, tout en continuant de monter sur scène. Dans Élémentaire, il raconte cette expérience insolite. Un témoignage drôle et poétique.
Formé au Théâtre national de Strasbourg en 1996, vous avez été comédien pendant 20 ans. Pourquoi avez-vous décidé de changer de cap ?
Comme tout le monde, j’ai été très marqué par les attentats de 2015 et j’avais besoin de retrouver du sens. Je m’interrogeais, en me disant que ces terroristes étaient passés par l’école de la République. Je voulais savoir ce qu’il se passait entre les quatre murs d’une classe. J’ai aussi eu envie d’agir, en aidant des enfants à devenir citoyens.
Racontez-nous votre première rentrée…
Résidant au Kremlin-Bicêtre, dans le Val-de-Marne, j’ai tenté et réussi le concours de professeur des écoles dans l’académie de Créteil. À la rentrée 2017, je me suis donc retrouvé devant une classe de CM1 à Villejuif. Au bout de deux jours, je me demandais ce que je faisais là. Beaucoup de travail et 27 élèves à gérer ! Je me suis dit que je ne finirai pas la semaine. Ça débordait de partout ! Finalement, j’ai pris mes marques et vécu six années scolaires très enrichissantes. C’est ce saut dans le vide, vertigineux, que je raconte dans Élémentaire.
Pourquoi avoir fait de votre expérience un spectacle ?
J’ai pris conscience, assez rapidement, que ce passage de la scène à l’enseignement serait passionnant à raconter. En écrivant Élémentaire, j’ai voulu apporter un témoignage poétique, avec le regard de quelqu’un qui découvre un nouveau monde. Le spectacle retrace ma première année scolaire, de septembre à juillet. Je montre comment tout se construit et évolue, en l’espace de quelques mois. Pour les élèves, comme pour moi d’ailleurs. Pour autant, je n’ai jamais renoncé au métier de comédien. J’ai fait ma première rentrée, en jouant le soir au Théâtre de la Tempête, à Paris. J’ai écrit Élémentaire en 2019 et profitais de mes congés pour partir en tournée.
« En classe ou sur scène, on construit une scénographie »
Comment qualifieriez-vous votre spectacle ?
Il joue sur plusieurs registres, dont l’humour. Par exemple, lorsque je compare mon aventure à un premier saut en parapente, en disant que « cette fois-ci, on n’est pas sûr d’avoir un parapente dans le dos ». Il y a aussi des moments plus graves, lorsque j’évoque cette anecdote, vraie, d’un père refusant d’amener ses affaires de piscine à sa fille, qui pleurait d’être privée de sortie.
Quelles similitudes voyez-vous entre le métier de professeur et celui de comédien ?
Dans les deux cas, on construit une scénographie : comment circuler dans la classe ou sur scène ? Comment installer les tables ou un décor ? Comment susciter l’attention ? Avec, cependant, une vraie différence : les réactions des enfants sont plus bruyantes que celles des spectateurs !
Enseignez-vous toujours ?
Non, j’ai arrêté en juin de l’année dernière. Mon rêve d’équilibre a tenu six ans, mais je ne pouvais plus concilier les cours, leur préparation et la tournée d’Elémentaire que j’ai déjà joué plus de 120 fois. C’était formidable mais épuisant.
Par Benoît Franquebalme (Agence de presse TOUTécrit)
Tarifs : de 9 € à 21 €.
Infos : 01 60 56 95 20.
Durée : 1h.